Le plus court mois de l’année vient de livrer ses chiffres implacables concernant l’inflation en général, alimentaire en particulier.
Pendant qu’au Salon de l'agriculture, la « ferme France » entendait et faisait entendre ses inquiétudes concernant l’eau, l’élevage de demain et le renouvellement des forces agricoles, l’Insee annonçait une inflation générale à 6% pour le mois de février, celle concernant l’alimentaire pointant à 14,5% et les négociations entre les industriels et les enseignes de la distribution s’achevaient.
Il faudra donc compter entre 4 et 7% d’augmentation des prix alimentaires d’ici le mois de juin. Telle est l’estimation de la société IRI pour la hausse globale des produits de grande consommation. Ce ne sont pas les 10% pressentis, mais c’est tout de même une somme, qui s’ajoute aux chiffres annoncés plus tôt dans la semaine par l’Insee.
Banques alimentaires débordées
L’alimentation est devenue le premier poste de dépense des ménages, avalant 16,2% du budget, premier contributeur de l’inflation générale avant l’énergie (8,6%). Le prix des denrées et matières premières est monté en flèche : +19,1% pour le lait, le fromage et les œufs ; +15% pour la viande et le poisson frais, +13,4% pour le pain et les céréales ; +50% pour l’emballage et es le carton en 18 mois…
Selon l’OFCE, 20% des plus pauvres consacrent 21% de leur budget à l’alimentation, contre 16,7% consacrés par 20% des plus riches. Résultat pour les banques alimentaires : explosion d’activité. En 2021, elles ont aidé entre 3,2 et 3,5 millions de personnes à se nourrir dignement. Si les précaires à se présenter sont certes 25% de plus qu’en 2011, les banques alimentaires disent venir en aider à trois fois plus de personnes qu’alors. Parmi les bénéficiaires, 17% (dont 60% en CDI) déclarent un emploi, c’est dire la tension extrême qu’exerce l’inflation sur le budget des ménages. Ils sont 67% à se déclarer dépendants alimentaires.
Selon Familles Rurales - pour qui bien manger est un bon réflexe anti-inflation parce que le consommateur privilégie des produits sains pour sa santé, en circuit court, en vrac, au plus près de ses besoins en somme -, une rallonge de 65 euros, soit un budget de 7,2 milliards d’euros, aux familles vivant au niveau du seuil de pauvreté leur permettrait de remplir tous les critères de la campagne PNNS (Plan national Nutrition Santé), destinée à diminuer les 20 milliards dépensés à titre de comparaison pour soigner les pathologies induites par une mauvaise alimentation.
Panier anti-inflation
Cette tension des prix de l’alimentaire va durer sans tempérer d’ici au mois de juin, et le gouvernement dit réfléchir à des mesures pour y faire face sans s’affamer. Ainsi Olivia Grégoire, ministre déléguée chargée des PME, du Commerce, de l'Artisanat et du Tourisme, a énoncé l’idée du « panier anti-inflation » mis en place pour trois mois à partir de ce mois-ci, inspirée par celui des magasins U, constitué de 150 produits. « Une cinquantaine de produits du quotidien à prix bas », De la viande, des produits d'entretien, d'hygiène, des articles issus de l'agriculture biologique et des produits frais… Une solution qui doit être pensée « avec le soutien des distributeurs », à qui Emmanuel Macron lors de sa visite du Salon de l'Agriculture a demandé « un effort sur leurs marges. »
Autre réflexe anti-inflation : repérer les MDD, autrement dit les marques distributeurs, les discounters et solderies. Les MDD, 10 à 20% moins chères que celles des marques nationales, ont, selon une étude de Kantar, contribué à hauteur de 36,7% aux ventes des supers et hypers en 2022. Pendant ce temps-là, le bio perd des parts de marché, mais ses prix grimpent moins vite que le tout-venant : +4,3% sur un an.
AV / © Tara Clark-Unsplash