Lille (R)évolution ! La capitale des Hauts de France et sa périphérie directe n'en finit plus de décoller culinairement parlant. Omnivore suit pas à pas depuis une décennie cette nordic movida.
Par Aitor Alfonso
Rozo
34 Rue Raymond Derain, 59700 Marcq-en-Barœul
03 62 27 72 52
www.restaurant-rozo.fr
Afin de loger tout leur talent, Diego Delbecq et Camille Pailleau ont quitté le centre-ville et se sont installés dans (beaucoup) plus grand à Marcq-en-Barœul. Leur Rozo prend désormais racine entre les murs d'une ancienne imprimerie ripolinée en resto-cathédrale à frontispice de briques rouges. Diego, libre dans sa tête, délivre une cuisine de saison et de percussion, bûcheuse et alerte : trouvaille de champignons, pickles et cresson en entrée ou agneau à la sauce d'herbes sous acides... Mais le menu recèle aussi un grand plat mer-terre : une concrétion d'algues et de légumes crus et cuits, mouillés d'une vivifiante eau iodée, en hommage culinaire à la marée descendante. Une création du chef entièrement végétale car chez Rozo, on mange avec son temps. En dessert, la glace au pollen de Camille vaut à elle seule les 20m de taxi depuis le centre de Lille. Malgré son déménagement, Rozo n'a rien perdu de sa bonne étoile.
Ginko
70 Rue de l'Hôpital Militaire, 59800 Lille
03 20 77 64 03
www.ginkorestaurant.fr
Une enseigne peut en cacher une autre ! Sous le panneau où est encore écrit "Le Vinci", c'est en fait le Ginko de Valentina Giacobbe et Julien Ingaud-Jaubert qui trace son sillon. Un élégant corridor tamisé donnant sur une courette intérieure, où irradie l'énergie placide de Valentina (passée par Rozo) et circule sa cuisine pointue, méticuleuse : Saint-Jacques poudrée de son corail fouetté de kimchi de carottes et bouillon acidulé et poudre de corail ; cabillaud comme un camé de nacre, prolongé de salsifis glacés, beurre blanc aux algues ; gnocchis plus verts que Shrek à la crème d'algues et salicornes... Avec la même aisance discrète, Julien décoche un impeccable sorbet à la poire sous un fin biscuit à l'amande en dessert. Et comme il a le shakeur sur la main, il prépare aussi des cocktails racés, dont celui à la figue fermentée. Ginko, une belle affaire à suivre.
Rillons
7 Rue Grande Campagne, 59242 Templeuve-en-Pévèle
03 20 64 25 60
www.rillons.fr
Rillons... à gorge déployée ! En plus d'entailler le Grand Lille au Witloof, son estaminet du XXIe siècle, Mickael Braure a décidé de mettre la barre plus haut dans cette auberge de village décomplexée, à quelques kilomètres du premier. Bois blond, cave à cigares et menu dégustation composent cette nouvelle adresse où l'ex Top Chef le plus débonnaire de France ajoute la finesse à la bonhomie (et un soupçon d'espièglerie) : tartare de langue de boeuf et couteau servis sur un crâne de bovin ; filet mignon de sanglier, churros de pomme de terre, chou pak choï et mousseline fumée aux trompettes de la mort ; étonnant dessert inspiré du couscous... Voici le chef Braure lancé dans un exercice de subtilité qui lui va bien, mais sans se renier, ni oublier sa devise : "le gras, c'est la vie" !
L'Annexe
613 Av. de la République, 59800 Lille
03 28 52 03 59
www.lannexe-lille.fr
L'Annexe, c'est le resto des familles aux abords de Marcq-en-Barœul, l'endroit où venir fêter l'anniversaire d'un oncle, l'obtention d'un baccalauréat ou des retrouvailles avec un groupe de vieux copains. Avec ses murs blancs et ses ampoules suspendues, l'établissement d'Alexandre et Anne-Sophie Montois appelle à la bonne humeur et le menu affiché sur l'ardoise fait la part belle au produit et à la générosité. Ce jour-là, ce fut filet de canette, betterave, radis et condiment estragon ; ration ogresque d'émulsion de polenta aux lentilles et compote de pissenlit ; généreux mignon de porc, endive, poire rôtie et vieux Boulogne ou plus chic homard au safran. En dessert, la mousse kiwi et gâteau au matcha régalent l'assemblée avec franchise et simplicité. Le service est attentionné et dynamique. Côté cave, il y a tout ce qu'il faut pour ne pas repartir avec sa soif derrière l'oreille... Cette Annexe est tout sauf accessoire.
La Laiterie
138 Av. de l'Hippodrome, 59130 Lambersart
03 20 92 79 73
www.lalaiterie.fr
Sur le chemin de l'ancien hippodrome, se dresse ce vestige de ferme laitière réincarnée en restaurant séculaire. Le chef breton Edouard Chouteau est allé à la belle école (Le Bristol, le Clarence à Paris) et poursuit son ascension de la haute-gastronomie par la face Nord, installé qu'il est dans les Hauts-de-France depuis trois ans. Dans le salon d'apparat, sa cuisine à toque oscille entre bel ouvrage de tradition et créations originales : crêpe soufflée enchâssée dans une bisque de coquillage et coiffée de caviar malgache ; morceau de bravoure en forme de tourte de faisan façon Rossini couverte de lamelles de truffe ; okonomiyaki de choux et sauce carbonnade flamande ; variation autour du maquereau... A prolonger des desserts lactés du chef pâtissier Benjamin Cannois, dont une glace aux gousses de vanille grillées mémorable. Mais rassurez-vous, on ne boit pas que du lait à La Laiterie : la cave, forte de plusieurs milliers de références, couve parmi les plus prestigieuses bouteilles de la région. Une adresse de cachet pour les grandes et belles occasions.
La Revue T, partenariat entre Omnivore et Transgourmet, explore et présente le monde des producteurs et des cuisiniers, à travers des débats, portraits et reportages qui la rendent unique en son genre.