Production en baisse drastique, prix en hausse historique. L'œuf subit l'épidémie de grippe aviaire, mais le contexte géopolitique et le cours des matières premières n'aident en rien.
Les œufs coûtent cher. +20% dans l'alimentaire et très bientôt dans les rayons, qui se clairsèment déjà, car la production fonctionne au ralenti en France depuis quelques temps. La cause première : une épidémie de grippe aviaire, dite Influenza, qui, depuis fin octobre, décime peu à peu les gallinacés. À ce jour, près de 13 millions d’animaux ont été abattus. Un bilan conséquent, voire dramatique pour le pays. D’après Loïc Coulombel, président du Syndicat national des industriels et professionnels de l'œuf, cela ne représenterait pas moins de 6% de la production journalière française. D'après Sud-Ouest, la région homonyme a été la plus sévèrement touchée, et a pu déclarer fin mars l'abattage de millions de canards (impropres à la fabrication du foie gras) et autres volailles en passe de l'être pour endiguer l'épidémie qui s'est propagée dans 792 élevages de la région au 15 mars, dont 338 seulement en Vendée.
Ce produit de base pour presque tous les corps de métiers de bouche ou du food service commence à accuser un certain coup, et coût. En effet, pour produire un œuf de qualité, il faut nourrir la poule avec des matières premières, qui n’échappent pas au contexte géopolitique mondial extrêmement tendu actuellement, puisque l’Ukraine, grenier à blé de l’Europe, est à l'arrêt complet. Au-delà de l'alimentation des animaux, le secteur volailler doit également accuser le coup d'une augmentation nette du prix de l'énergie, ce qui rejaillit sur l'entretien des cheptels.
Côté vente, les éleveurs n'auront d'autre choix que de vendre leurs douzaines d'œufs beaucoup plus cher, pour couvrir le manque à gagner et les conséquences de l'épidémie. Les hypers et autres moyennes et grandes surfaces devront donc s'adapter au consommateur qui aura peine à suivre ces fluctuations de prix, déjà préoccupé par les augmentations conséquentes de celui des énergies, des matières premières et, bien sûr, de l'essence. Du côté des professionnels, les boulangers-pâtissiers, qui subissent déjà la hausse du prix du blé, vont devoir également ouvrir leur porte-monnaie de plus belle pour se fournir en œufs ou ovoproduits, également concernés. Sur RTL, Loïc Coulombel annonçait que les boulangers-pâtissiers subiront une augmentation des prix de 40 à 50% par rapport à l'an passé et que les industriels et professionnels de la restauration accuseront la hausse la plus violente : « Ça va de 40 à 100% ». L'hôtellerie-restauration, toujours vacillante malgré un regain de dynamisme, est elle aussi concernée par ce produit de base et devra une fois de plus s'adapter.
Les élevages nord-américains gravement touchés
La France et beaucoup d'autres pays européens ne sont pas les seuls à subir de plein fouet cette escalade de problèmes sanitaires et d'envolées de prix. La grippe aviaire dite Influenza fait des ravages aux États-Unis, qui peinent à voir le bout de l'épidémie. La contagion, notamment transmise par le biais d'oiseaux sauvages, touche des millions de gallinacés, ce qui implique comme en Europe, des abattages de grande envergure et des pondaisons empêchées. Il suffit qu'un seul animal soit testé positif pour que tout un cheptel avicole soit supprimé. Le prix des œufs aurait atteint 50% d'augmentation, bien plus que lors de la dernière épidémie de 2015, déjà virulente. La viande de volaille, très consommée aux États-Unis est également soumise à une très nette augmentation de prix. Today précise que dans le midwest, très actif dans l'industrie avicole : « Le coût d'une douzaine a dépassé les 3 dollars le 31 mars, ce qui ne s'est produit qu'une seule fois auparavant, selon les spécialistes du marché Urner Barry. La hausse des coûts est due en partie à l'épidémie de grippe aviaire qui a été détectée dans au moins 26 États et a entraîné la mort de millions d'oiseaux. » D'après le site Statista, le prix de l'œuf au détail en 2021 connaissait déjà une augmentation significative, approchante de celle de 2015, à l'époque de la dernière grippe aviaire qui fut un véritable désastre pour le monde avicole nord-américain. Très grand producteur et exportateur d'ovoproduits, les États-Unis figurent dans le top 10 des pays champions de la ponte, occupant la 4e place après la Chine. Rien qu'en 2020, le pays produisait plus de 110 milliards d'œufs, contre environ 15 milliards pour l'Hexagone.
Hannah Benayoun