Aurélie Collomb-Clerc : « L'évolution de la pâtisserie est très rapide »
Aurélie Collomb-Clerc est la cheffe pâtissière de Flocons de Sel à Megève, aux côtés d’Emmanuel Renaut. C’est après avoir quitté Sciences Po qu’elle prend la route du goût pour, aujourd’hui, encourager les plus jeunes à choisir la pâtisserie.
Aurélie Collomb-Clerc est la cheffe pâtissière de Flocons de Sel à Megève, aux côtés d’Emmanuel Renaut. C’est après avoir quitté Sciences Po qu’elle prend la route du goût pour, aujourd’hui, encourager les plus jeunes à choisir la pâtisserie.
Quels sont les enjeux pour les équipes ?
Avant tout, s’adapter à leur environnement. L’enjeu le plus important lorsque le jour J d’un concours arrive, c’est d’être meilleur que les autres, d’être bon. Chacun a sa place dans le concours et chacun se doit de donner le meilleur.
Vous avez été reconnue par vos pairs à plusieurs reprises, quel regard portez-vous sur les concours, comment les filières se nourrissent entre elles ?
J’ai pu découvrir les concours en tant que candidate et dorénavant en tant que membre de jury. Ce sont des défis avant tout personnels, donner ses tripes, faire parler sa personnalité, activer un savoir-faire souvent face à des membres du jury que l’on connaît pour leur travail, certain.e.s sont parfois des modèles. Participer à un concours se décide souvent lorsque l’on est jeune, on affirme son caractère, on gagne en confiance en soi, on se prouve que l’on est capable de le faire. Il ne faut pas mettre de côté la notion de plaisir, pour le jury notamment.
Au fil des échanges, on remarque que la quête du goût juste est la plus importante. Quelles sont vos attentes personnelles ?
Je suis également sur le goût. On entend parfois que l’esthétique peut se hisser au-dessus du goût, mais je reste persuadée qu’il ne faut jamais écarter le goût, il reste prédominant, il ne faut jamais perdre cette notion, surtout lorsque l’on est membre du jury. On se doit de rester concentré sur notre palais et les émotions qui nous traversent. L’art de notre métier reste également de mettre en lumière des produits, j’y serai attentive. La beauté du concours reste également de découvrir des nations, des identités, des cultures.
Quel souvenir gardez-vous de la sélection Europe ?
La Scandinavie m’a marquée par son approche de la gastronomie. Je n’ai pas encore eu la chance de m’aventurer dans les pays du Nord, cependant, j’ai aimé découvrir cette approche avant-gardiste, brute, épurée, presque design.
La pâtisserie gagne en modernité, s’écarte de la tradition classique. Quelles sont vos observations sur ces dernières années ?
Son évolution est très rapide. La première observation reste sur le pan technique, les outils, des moyens qui se développent et qui nous permettent d’aller de plus en plus loin. En dix ans, l’évolution a galopé. J’ai pu le constater en chocolaterie, pour les moulages. On découvre les one shot, les machines créées. Les mœurs, les valeurs, ont changé aussi. Respecter le produit, retourner au circuit-court, on sent que tout cela devient normal et la conscience est là. Le client y est sensible, et on sent que cela prend.
Vous avez décidé de vivre de votre passion sur le tard et vous avez été plusieurs fois récompensée ces dernières années…
C’est vrai, le dernier prix de meilleure pâtissière que j’ai obtenu aux Grandes Tables du Monde, est arrivé quelques temps après Christelle Brua et c’est un honneur pour moi de lui succéder. Elle m’a inspirée dans mon évolution, dans ma formation. J’ai la chance de perpétuer cette parole de femme dans ce métier. Je suis heureuse des choix que j’ai pu faire, j’ai pu acquérir une certaine maturité, j’ai pu prendre cette direction et de réaliser exactement ce que je voulais.
Commence-t-on les métiers d’artisanat et métiers de bouche trop jeune ? Est-ce un sujet tabou ?
Je pense que cela reste complexe. Nous sommes nombreux.ses à dire qu’il est impossible de dire à 15 ans ce qu’elle ou il va faire toute sa vie. C’est un âge d’insouciance et il faut la laisser se consumer. Aujourd’hui, on continue d’insuffler à cette jeunesse l’idée qu’ils n’ont pas le droit à l’erreur, je me suis trompée, mais ce n’était pas une erreur, j’ai su ce que j’ai voulu faire à ce moment-là. D’autres sont sûr.e.s de leur choix, étant issu.e.s de familles de boulangers, de cuisiniers, de pâtissiers. Il faut absolument laisser ce temps de réflexion à la jeunesse.
Vous intervenez régulièrement en milieu scolaire pour échanger sur le métier…
J’étais en apprentissage à 20 ans. J’ai toujours accompagné mes collègues dans leurs difficultés, gardé en tête l’importance de l’échange et de la transmission. Une fois l’école dernière moi, mes enseignants ont toujours gardé le lien avec moi, j’ai pu être examinatrice aux examens, j’entretenais ce lien avec les plus jeunes. C’était à mon tour d’être là pour eux, en tant qu’intervenante dans les collèges sur le sujet de l’orientation, mais aussi auprès des parents et des professeurs. Beaucoup pensent encore à tort que l’alternance reste « une voie de garage » alors que nous avons des métiers magnifiques qui ne cessent de créer des vocations.
En trois idées clefs, votre définition d’un beau dessert de restaurant ?
Je dirais : lisibilité, une mise en valeur du produit, une émotion gustative… Voici, pour moi, un beau dessert de restaurant.