Hommage gastronomique au vingtième président de la République française, décédé ce mercredi à l’âge de 94 ans, en une recette : la soupe aux truffes de Paul Bocuse.
Valery Giscard d’Estaing, grandi en Auvergne-Rhône-Alpes et décédé en Centre-Val de Loire, ce mercredi à l’âge de 94 ans des suites d’un covid, restera dans l’histoire pour les raisons que l’on sait (le plus jeune Président de la Ve République, celui qui aura vécu le plus longtemps, la dépénalisation de l’avortement, le divorce par consentement mutuel, l’abaissement de la majorité civile à 18 ans, l'Europe…) Mais il aura été également, peut-être à son corps défendant, le président le plus « gastronomique » de la Ve République, talonné par Mitterrand le gourmet et Chirac le gourmand, prônant à la fois une cuisine diététique (la légende raconte qu’il a banni la charcuterie des cuisines présidentielles à son arrivée en 1974) et laissant son nom à un plat mythique : la soupe aux truffes VGE, créée par Paul Bocuse pour le déjeuner du 25 février 1975 « offert par Monsieur le Président de la République et Madame Valéry Giscard d'Estaing à l'occasion de la réception de Monsieur Paul Bocuse dans le grade de Chevalier de la Légion d'Honneur », au Palais de l'Élysée.
Soupière à gratinée
Comme Auguste Escoffier, fait chevalier en 1919 et officier en 1928 par Edouard Herriot, pour faits d'armes lors du conflit franco-prussien en 1870, Paul Bocuse se distingue pour son rôle lors de la Seconde guerre mondiale. Mais « tout est parti d'un gag », racontait Jean-François Mesplède, ex-directeur du Guide Michelin, à l’Express en 2014. « Bocuse reçoit, un jour de 1975, un courrier sur papier à en-tête de l'Elysée et signé Valéry Giscard d'Estaing qui lui annonce que le Président en personne lui remettra la Légion d'honneur. En réalité, le coup a été monté par des farceurs, et la signature présidentielle, imitée. Mis dans la confidence, VGE décide de jouer le jeu et décore le chef de Collonges la même année. Pour marquer le coup, Bocuse prépare pour la réception au palais présidentiel ce plat devenu mythique ». Dans une soupière à gratinée individuelle recouverte d’une calotte dorée de pâte feuilletée, du bouillon de bœuf, des dés de paleron, un matignon de légumes, des dés de foie gras et des copeaux de truffes, dégusté en entrée lors du petit « repas entre amis » qui fête la distinction avec le couple présidentiel, en compagnie de Raymonde, Claude Jolly (critique gastronomique à l'Express), Louis Outhier, Pierre Troigros, Charles Barrier, Pierre Laporte, Jean Troigros, Roger Vergé, Alain Chapel, Jean-Pierre Haeberlin et Michel Guérard.
La recette, servie encore en 2019 au Dîner hommage des Grands Chefs du monde à l'abbaye de Collonges et adaptée du Best of Bocuse (de Paul Bocuse, Christophe Muller / Photographies : Valéry Guedes)
Pour 4 VGE :
80 g de truffes fraîches
50 cl de bouillon de volaille
150 g de blanc de poulet sans peau
100 g de céleri-rave
1 carotte
8 têtes de champignons de Paris de 3 cm de diamètre
4 c. à s. de noilly prat blanc
60 g de foie gras cuit
250 g de pâte feuilletée
1 jaune d’œuf
Sel fin
Préchauffez le four à 200 °C (th. 7). Portez le bouillon à ébullition dans une casserole. Salez légèrement le blanc de poulet et déposez-le dans le bouillon. Laissez cuire 6 min à petits frémissements, puis égouttez-le. Mettez le bouillon pour la soupe de côté.
Préparez une brunoise de céleri, carotte et champignons, taillés en matignon.
Taillez les truffes en très fines lamelles.
Versez 1 c. à s. de Noilly Prat dans quatre bols en porcelaine d’une contenance de 25 à 30 cl, allant au four. Ajoutez 1 c. à s. bombée de brunoise. Taillez le foie gras en dés. Répartissez-les dans les bols.
Détaillez 4 disques de pâte feuilletée de 13-14 cm de diamètre. Posez un disque sur chaque bol et refermez la pâte sur les bords. Enfournez et laissez cuire 20 min.
« Et maintenant monsieur le Président, on va casser la croûte ! »
AV