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Tentations gourmandes dans l'air du temps

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Totems d’une cuisine universelle, salés et sucrés, à boire et à manger, nés aux quatre coins du monde ; qui mieux que ces icônes de la street food pour incarner les tendances culinaires actuelles ?

Banh mi
Le plus hybride

Les jours du sacro-saint "jambon-beurre" sont-ils comptés ? La baguette est prise en flagrant délit d’infidélité avec une garniture vietnamienne ; ce nouveau couple formant le banh mi, traduisez « gâteau et mie ». En couches, sont superposés pâté de porc vietnamien, ou cochon laqué, ou bœuf à la citronnelle, ou poulet grillé, ou sardines à la tomates avec pickles de carotte et de radis blanc, coriandre, piments, mayonnaise et la touche finale : quelques gouttes d’arôme Maggi. Sandwich hybride produit de la colonisation qui a vu le jour à près de 10 000 kilomètres d’ici, il y a soixante-dix ans, alors que la baguette importée par les Français commence à se démocratiser dans les rue d’Hanoï et de Saigon. Icône de la street food non seulement du Vietnam, du nord au sud, mais aussi en France où son aura est grandissante.

Bubble tea
Le plus instagrammable

Couleurs flashy, perles de tapioca, morceaux de gelée et pailles XXL, il n’y a pas plus photogénique qu’un bubble tea. Sur Instagram, il écrase la concurrence à coup de millions de vues. Plébiscité par les jeunes générations biberonnées à la pop culture asiatique, ce thé aux bulles voit le jour dans les années 1980 à Taïwan. À l’origine, il s’agit d’un thé noir au lait à siroter avec une grosse paille qui laisse passer les boules de tapioca ! Ce drôle de thé va faire le tour de la planète grâce aux réseaux sociaux friands de cette boisson ludique et conviviale. Le must est de jouer avec les variétés de thé, de lait, de sirops parfumés et de topping. Les enseignes pullulent surfant sur une tendance qui n’a pas l’air d’être une "bulle" ! Le cabinet américain Allied Market Research évalue le marché à 5,4 milliards de dollars à l’horizon 2033.

Poulet frit
Le plus croustillant

Le poulet rôti du dimanche est-il sur le point d’être ringardisé par le poulet frit, son cousin américain ? Un vent de folie secoue la restauration rapide au point de voir, dans les commandes, le pilon croustillant supplanter l’universelle pizza. Le poulet frit profite de la popularisation depuis des années des "tenders" et autres nuggets par les pionniers du marché, KFC et McDonald’s, qui ont bien préparé le terrain aux nouveaux entrants. Françaises, britanniques ou encore américaines, ces enseignes qui ont pour noms Chicken Street, Pepe Chicken, Chicken Stop, Wingstop ou encore Popeyes et ses recettes cajun partent à l’assaut d’un marché en plein essor : la consommation de poulet a doublé en vingt ans en France. La cuisine asiatique ne compte pas rester inerte face à cette déferlante : la street food japonaise a déjà dégainé ses propres poulets frits – le karaage et le katsu – tandis que les Coréens, eux, se lancent dans la bataille avec leur dakgangjeong aux saveurs aigres-douces pimentées.

Ramen
Le plus réconfortant

Dans l’impénétrable maquis des nouilles asiatiques, le ramen, totem nippon aux racines chinoises, adulé dans son archipel, a du faire preuve de ténacité et de patience hors de ses frontières et notamment en France pour, enfin, se faire un nom et une réputation qui aujourd’hui le hissent dans l’aristocratie des soupes réconfortantes. Merci aux mangas addicts aux ramen qui les ont popularisés dans le monde entier ; merci encore aux chefs japonais, français et aux chaînes réputées qui ont supplanté les imposteurs de tout poil. Car le ramen se contemple comme une œuvre d’art : dans un bouillon fumant et parfumé, délicieusement gras, nagent des nouilles épaisses et fermes, pousses de bambou, des algues nori ou wakame, des oignons, un demi œuf mariné, parfois des fruits de mer, une prune salée, et ces fines tranches de rôti de porc, que l’on retourne délicatement avec ses baguettes ; à chacun de composer son ramen personnalisé. Il existe autant de régions que de variétés de soupe ramen. Ceux de Sapporo sont au miso, ceux de Tokyo au poulet et à la sauce soja.

Hot-dog
Le plus nostalgique

Le hot-dog est mort, vive le hot-dog ! Il faut sans doute avoir les tempes grisonnantes pour se souvenir de ces machines à hot-dog avec leurs piques métalliques hérissées qui laissaient une place toute chaude à la saucisse de Francfort cuite à la vapeur et relevée d’un trait de moutarde forte. Le chien chaud, comme on dit au Québec, se dégustait ainsi, debout, au comptoir ; petit plaisir, hélas disparu mais la relève a fini par (re)débarquer des… États-Unis. Là-bas, c’est le sandwich préféré des Américains – après le hamburger –, servi dans des food trucks. Pas question pour un supporter d’assister à un match de base-ball sans croquer dans ce pain mou, nappé de ketchup et couvert de relish (légumes marinés façon pickles) et d’oignons frits. La copie, souvent bien imitée, avec son pain moelleux, est en train de gagner, hors de l’empire américain, ses galons de nouvelle icône de la street food qui raffole de son format passe-partout et de ses combinaisons multiples pour la viande : porc, bœuf, volaille, dinde avec option halal sans compter les sauces (mayonnaise, curry, samouraï, moutarde, miel, etc.) et les ingrédients qui finissent pas faire du hot-dog un plat complet. Et furieusement désirable.

Donut
Le plus régressif

Très longtemps réduit à une caricature de la malbouffe américaine, le donut serait-il en train de gagner ses lettres de noblesse au pays où la pâtisserie est une référence ? Avec plus de 300 000 donuts vendus chaque jour en France, ce petit beignet troué aux glaçages multicolores jouit d’un engouement sans précédent et aiguise l’appétit des deux géants américains qui ont décidé de partir à l’assaut de l’hexagone : Krispy Kreme, né en 1937, implanté il y a un peu plus d’un an à Paris avec une méga-boutique de 550 mètres carrés et l’ambition d’ouvrir 500 points de vente d’ici 2028. En face, Dunkin’ Donuts, le numéro un outre-Atlantique, a profité des Jeux olympiques et paralympiques de Paris pour annoncer son arrivée prochaine dans la capitale. Ces industriels réussiront-ils leur intégration culturelle sur un marché où quantité d’artisans, français et américains, sont déjà implantés avec des donuts plus raffinés qui réussissent à marier avec succès l’esprit américain originel et l’exigence française du bon goût ?

Par Jean-Pierre Montanay