À Santiago au Chili, le 14 juillet, les candidats devront réaliser une assiette avec du quinoa, ingrédient fort du pays hôte de la sélection Americas du Bocuse d’Or.
Le quinoa est cultivé partout, de haut en bas, au Chili : dans l’Altiplano avec ses communautés Aymaras au Nord, dans la région centrale avec des agriculteurs descendants d’espagnols et, au Sud, avec les paysans Mapuche. Son patrimoine génétique intéresse donc le monde entier, au vu de sa cultivabilité tout terrain. C’est une graine millénaire, originaire des bords du lac Titicaca, dans l’Altiplano, cultivée depuis environ 7 000 ans, qui cumule les bons points.
Cousin de la betterave et des épinards, graine du pauvre dans sa région d’origine devenue star mondiale, le quinoa, est répertorié comme « pseudo céréale », car ses graines se consomment sous forme de farine, flocons ou graines soufflées, ou encore « super-aliment », sans gluten, riche en protéines, en antioxydants, en vitamines B, en minéraux et en oligo-éléments. C’est paradoxalement le paramètre « sans gluten », un atout aujourd'hui, qui ont poussé les conquistadors à privilégier la patate et le maïs et délaisser le quinoa, non panifiable.
Mais ce « super-aliment » est revenu sur le devant de la scène alimentaire et a conquis les Occidentaux, dont les Français, qui en mangent près de 6 000 tonnes par an. Il a eu droit à son Année internationale en 2013 avec l’Onu, en raison de son utilité dans la lutte contre la malnutrition dans le monde, pour renforcer la sécurité alimentaire, et l’amélioration de la biodiversité ; et la NASA l’a même envoyé pousser dans l’espace, pour nourrir les astronautes de la station spatiale internationale en 2015.
3 000 variétés, 3 grandes familles
Ce sont les pays voisins, le Pérou et la Bolivie, qui produisent 92% du quinoa mondial (229 millions de tonnes en 2015), dont le prix a doublé de 2006 à 2011, dopé par la tendance et, de fait, la demande mondiale. L'Europe consomme 5 000 tonnes de quinoa par an, soit 25 fois moins que les États-Unis. Ce chiffre est en constante augmentation. « En plus de ses qualités nutritionnelles, le quinoa attire les consommateurs occidentaux à la recherche de produits issus de l’agriculture biologique, précise, dans ses différentes interventions, Didier Bazile, spécialiste mondial du quinoa. Il est bio par défaut puisqu’il se cultive à haute altitude, là où il n’y a pas de ravageurs, et ne nécessite donc aucun pesticide. »
Le quinoa compte plus de 3 000 variétés, mais seules quelques-unes ont été commercialisées et plus de 120 pays dans le monde, jusqu'en Asie, expérimentent de nos jours sa culture. Elles se répartissent en trois grandes « familles » : le quinoa blanc, le plus connu et consommé, noir et rouge. Le quinoa rouge a une saveur beaucoup plus brute que le blanc, plutôt noisetté. Le quinoa noir à un goût plus terreux, plutôt consommé en soupe ou en salade. Ici, en France, on se souvient bien des lasagnes de quinoa, bouillon d'artichaut barigoule, de Nadia Sammut ; des campignons sauvages frits sur un lit de quinoa rouge, de Mauro Colagreco ou de la féra du lac Léman, câpres et quinoa, d'Emmanuel Renault, à Megève. On a hâte de voir ce que les candidats au Bocuse d’Or vont créer avec la « mère des graines », que les Incas offraient aux dieux.
AV
© Pierre Bamin