Miimosa : "l’agriculture est une réponse commune aux enjeux du siècle"
On ne la présente presque plus. Créée en 2015 par Florian Breton, Miimosa s’est imposée comme la plateforme dédiée au financement de projets liés à l’agriculture et à l’alimentation durable.
On ne la présente presque plus. Créée en 2015 par Florian Breton, Miimosa s’est imposée comme la plateforme dédiée au financement de projets liés à l’agriculture et à l’alimentation durable.
En cinq années d’existence, Miimosa a déjà porté 3000 projets destinés à celles et ceux qui souhaitent développer ou élargir une activité agricole ou alimentaire. Pour mener à bien le financement de ces projets, deux méthodes : le don avec contrepartie et le prêt participatif. Exploration d’un modèle en pleine expansion avec Sophie Cucheval, directrice des opérations.
Quelle a été l’idée de départ avec la création de Miimosa ?
En 2015, quatre constats ont été faits par Florian Breton, petit-fils de viticulteur du sud de la France, et qui a grandi dans le secteur agricole. Le premier constat, était la croissance évidente du marché du financement participatif (2009 : avènement des plateformes généralistes comme KissKissBankBank ou Ulule), mais avec une mise en marge des financements de projets agricoles ou alimentaires. Le deuxième était le besoin de financement important dans le secteur agricole, très capitalistique et encore plus pour des projets de transition. Troisième constat : les banques pouvaient été frileuses face au financement d’innovation dans le secteur. Enfin, le souhait de rapprochement des citoyens vers le monde agricole, notamment grâce à l’alimentation, la consommation, le dialogue avec les agriculteurs.
L'agriculture est effectivement l’épicentre du projet Miimosa, un secteur évidemment en proie à d’immenses difficultés. Était-ce un défi de confronter, d’allier ce secteur à celui du financement participatif (start-ups, entreprises…) ?
Cela a été plus difficile au niveau des partenaires du monde agricole, les consulaires, les banques, les CCI, les chambres d’agriculture, les banques, il a fallu plus de pédagogie. Le domaine du financement du monde agricole avait très peu évolué avant la création de Miimosa. Il faut savoir que les agriculteurs sont très connectés depuis longtemps, notamment pour suivre l’évolution de leur activité, ils sont très ancrés dans leur territoire, ont un grand réseau de fournisseurs, des clients, des distributeurs et ils peuvent réaliser de très belles collectes. Très rapidement, ils se sont emparés de l’outil qu’est le financement participatif et ont fédéré une communauté autour d’eux. Dorénavant, nous avons une collecte moyenne supérieure à la collecte moyenne nationale réalisée notamment par des plateformes généralistes, qui accompagnent un grand nombre de projets, alors que l’agriculture représente 3 ou 4% des projets. Notre plateforme capte environ les trois-quarts du marché, mais l’agriculture reste un petit secteur dans celui du financement participatif, largement dominé par le secteur culturel.
Certains acteurs méconnaissent le secteur agricole ?
Il ne s’agit pas forcément de méconnaissance car il existe notamment des banques mutualistes qui financent le monde agricole, bien implantées sur le territoire et qui connaissent précisément les enjeux. Cependant, il existe un encadrement réglementaire qui ne permet pas d’accompagner tous les projets, et une analyse un peu plus industrielle des projets qui fait que certains ne sont pas accompagnés, alors qu'ils pourraient l'être.
Miimosa multiplie depuis quelques années les collaborations notamment avec des chefs, des partenariats divers et connait une expansion très forte au coeur de la French Tech. Avez-vous noté une évolution des profils parmi ceux qui font dorénavant appel à vous ?
Il y a eu deux évolutions. La première, liée aux évolutions des outils de financement. Historiquement, nous proposions le don en contrepartie, qui permettait de couvrir des besoins entre 5000 et 20000 euros, qui attiraient les petites et moyennes exploitations ou autres projets types lancement de marques, start ups, du côté de l'alimentation. Le prêt participatif permet aujourd’hui de financer des projets plus importants en termes d’investissement. Cela peut aller de 15 000 à 1 million d’euros, le profil a donc changé, nous recevons de plus grandes exploitations qui souhaitent notamment opérer une transition énergétique et agricole. Du côté de l’alimentation, des entreprises de la food tech nous approche en complément d’une levée de fonds, comme Oé pour les vins ou encore Rutabago.
Cette diversification vous recentre-t-elle sur un pilier en particulier ?
Notre porte d’entrée a toujours été l’agriculture : c’est le vecteur le plus puissant pour adresser les enjeux du siècle. Lorsque l’on parle de climat, de santé, de biodiversité, l’agriculture est une réponse commune à ces enjeux. L’agriculture mène aussi aux énergies renouvelables, cette production par les agriculteurs et un formidable moyen de diversification économique pour des exploitations. Il y a enfin l’alimentation avec les étapes de transformation ou encore la food tech. L’agriculture est le socle et tous ces enjeux en découlent.
L’alimentation est un enjeu de conscience énorme, notamment depuis le début de la crise sanitaire…
Nous avons connu un record pendant le confinement. Nous avons capté la volonté citoyenne à soutenir l’agriculture française. Les gens ont réalisé que même si on évoquait beaucoup la souveraineté alimentaire, la fragilité de modèles agro-industriels dominants, certains se sont rendu compte qu’ils ont été nourris en qualité, en quantité et diversité suffisantes par les agriculteurs pendant le confinement. Nous avons enregistré un véritable élan de soutien durant cette période. Nous avons donc adapté nos outils de financements pour les agriculteurs, prêts à court terme ou trésorerie, écouler leur production si circuits de distribution fermés… Tout l’enjeu, c'est que ce message continue à être entendu.
La restauration affronte évidemment l’une des pires périodes de son histoire, secteur intimement liée à l’agriculture, quelles seraient les possibilités pour vous en la soutenant ?
Nous collaborons déjà avec le chef Yves Camdeborde, une opération sur la restauration durable, Les Cuistots Engagés. Il s’agit d’un appel à projet à travers lequel on invite des restaurateurs impactés à porter une collecte de financement participatif pour soutenir des projets de développements qu’ils auraient inscrit dans la transition : gaspillage, réinsertion de personnes éloignées de l’emploi, approvisionnement en circuits courts… Je pense aussi aux brasseries, très impactées. Cet appel est aussi un moyen d’apporter un soutien au-delà du financement participatif, la restauration est un canal de pédagogie sur l’alimentation, et débouché commercial pour les agriculteurs, nous les accompagnons également.
HB
- 5 ans d’existence
- 3000 projets financés
- 30 millions d’euros collectés
- Deux levées de fonds effectuées (1 million d'euros en 2016 et 3 millions d'euros en 2017)