Ni pâtisserie orientale, ni pâtisserie traditionnelle française, la Maison Aleph de Myriam Sabet propose une gamme de desserts totalement novatrice. Et quand les techniques de la pâtisserie française s'allient aux parfums du Levant, les becs sucrés ne s'y trompent pas.
Pour passer du monde de la finance à l'univers de la pâtisserie, Myriam Sabet admet volontiers que sa gourmandise a été l'élément déclencheur : "avec la naissance de ma fille, je voulais donner un sens à ma nouvelle vie, entreprendre et être dans la création. La pâtisserie, ça a fait tilt ! J'avais envie d'apporter quelque chose de nouveau et différent à la meilleure pâtisserie du monde qu'est la pâtisserie française, en travaillant les goûts et les saveurs du Levant et du Moyen-Orient !" Petite, sa mère ou sa grand-mère préparaient plutôt des desserts français et allaient acheter en boutique les pâtisseries orientales. "Les deux se retrouvaient donc sur la table pour les repas de famille, l'envie de mélange doit me venir de là", se souvient la quarantenaire douce et pétillante.
CAP pâtisserie en poche et après quelques expériences dans des maisons parisiennes, elle se forme ensuite aux techniques de la pâtisserie orientale avant de fonder Maison Aleph avec son mari en 2017. "Aleph" comme la première lettre de l'alphabet arabe, en référence à ses origines syriennes. Point de traditionnel baklavas ni de banals croissants au beurre ici ; dans ses deux boutiques, la cheffe pâtissière réinterprète galette des rois et autres bûches de Noël avec les parfums de son enfance. "Maison Aleph est un ovni, mais j'aime bien ne pas entrer dans des cases, ça laisse plus de liberté, sinon on s'ennuie. J'ai construit mon propre alphabet", sourit-elle.
Eaux florales
Le mariage est réussi. Les deux répertoires pâtissiers très différents sont devenus au fond complémentaires : "il y a des textures comme le croustillant de la pâte filo ou des cheveux d'ange qui ouvrent de nouveaux horizons à la pâtisserie française, et inversement des parfums comme la fleur d'oranger ou l'eau de rose pouvaient sembler galvaudés car ils manquaient de qualité." Chez Maison Aleph, Myriam Sabet mise sur des matières premières haut de gamme, à l'instar des eaux florales faites spécialement par une coopérative selon son cahier des charges, sans conservateur ni colorant (disponibles à la vente en boutique, ndlr). Même exigence pour les produits d'origine française : la cheffe travaille avec des producteurs qui fournissent les plus belles tables de la capitale "C'est un sacerdoce avec lequel je ne transige pas", ajoute-t-elle.
Intellectualiser
En 2020, Myriam Sabet commence à développer une gamme de tartes avec une base de pâte filo - signature de la maison - travaillée sur deux jours, au beurre clarifié pour plus de légèreté, et au croustillant incomparable. "Pour moi la tarte aux fraises est à la fois emblématique de la pâtisserie française et du plaisir enfantin le plus simple. J'avais envie de la réinterpréter selon la Maison Aleph, donc la fleur d'oranger remplace la vanille de la crème pâtissière et quoi de plus voluptueux que la pistache pour accompagner la fraise ?! C'est ça que je trouve magique avec la pâtisserie : on peut intellectualiser le processus de création, mais à la dégustation, le plaisir est totalement régressif." Et après les chocolats et les glaces, ce sera très prochainement au tour des guimauves et des nougats d'être revisités avec gourmandise à la sauce Maison Aleph.
Par Maryam Lévy