Face à la vague de contamination en cours sur certains territoires ou annoncée dans d’autres, jamais l’eau-de-vie n’aura aussi bien porté son nom.
Reste à organiser l’union sacrée entre santé, douanes et alcooliers afin de fabriquer en urgence le précieux gel hydroalcoolique qui manque tant, à l’échelle mondiale, aux premiers sur le front du coronavirus : personnels soignants, ambulanciers, forces de l’ordre, routiers, cheminots, agents de caisse, boulangers…
Puisque « n’importe quel alcool à 70% vol. peut être efficace pour se désinfecter les mains », comme l’a rappelé le professeur Philippe Brouqui, chef du Pôle des Maladies Infectieuses CHU Timone – IHU Méditerranée Infection, les alcooliers ont réagi.
Depuis plus d’une semaine, certains se sont mobilisés contre la pénurie d’éthanol ou alcool surfin à 96% vol. dans la chaîne hospitalière et pharmaceutique, qu’il s’agisse de grands groupes alcooliers, cosmétiques, sucriers et autres producteurs d’agrocarburants ainsi que de nombreux distillateurs artisanaux dans toute la France et à l’étranger pour livrer les pharmacies, laboratoires et hôpitaux et leur permettre de produire le précieux gel hydroalcoolique comme l’y autorise un arrêté du 6 mars.
La coordination entre les alcooliers, les Agences Régionales de Santé (ARS) et les services des douanes est essentielle pour ceux en capacité de produire en quantité et de livrer des stocks importants à échelle nationale et régionale. Si vous êtes en capacité de fournir cet effort, contactez les ARS, et en particulier celles des régions les plus touchées.
Chaque litre, chaque minute compte
Au niveau local, un appel a été lancé avant la circulaire des douanes adressée aux pharmaciens et relayé par nombres de distilleries. Elle simplifie les démarches, une mesure exceptionnelle et facilement mise en place entre une distillerie et une pharmacie ou un hôpital. Surtout, ne pas ralentir les dons aux hôpitaux ou des cessions à prix coûtant aux pharmacies, toujours nécessaires dans toutes les régions de France. Malgré que les fraudes avec le ministère de l’Écologie essaient de faire passer un arrêté national pour stopper les dons d’ethanol (dossier en cours, on vous tient au courant) !
Un grand inventaire des stocks disponibles est actuellement réalisé par la Fédération Française des Spiritueux et la coordination de ses adhérents avec les ARS. L’industrie lourde est en marche. De même, des interprofessions, des AOC et des indépendants multiplient les initiatives locales. La filière se mobilise dans sa quasi-totalité et devrait permettre de faire face rapidement, mais chaque litre et chaque minute comptent ! Il suffit d’un numéro de SIRET pour remplir les formalités douanières et de se mettre en conformité pour l’étiquetage obligatoire avec la DGCCRF de surcroît.
Outre-mer, des arrêtés préfectoraux sont attendus pour permettre de passer outre la norme de l’OMS sur l’éthanol à 96% et donc d’utiliser de l’alcool à plus faible degré que l’on peut techniquement produire sur place afin de protéger les populations locales.
Douanes
En Belgique et en Grande-Bretagne, comme aux États-Unis et au Canada, les douanes locales vont même plus loin en autorisant, voire aidant, les distilleries locales à produire directement du désinfectant dont la demande sera importante pendant plusieurs semaines, avec une suspension des droits indirects bien évidemment.
Localement, les distilleries aident directement la population. Le lobby alcoolier américain a même pris les devants en communiquant les recettes et procédures avant même l’autorisation des douanes et demandent un soutien immédiat aux distilleries pour éviter leur faillite alors que le maintien de leur activité peut s’avérer vital à moyen terme sur certains territoires. Exemption de taxes jusqu’à la fin de l’année (et rétroactivement depuis le 1er janvier 2020), prêts à taux zéro, annulation des barrières douanières, création d’un fond de stabilisation de l’industrie, réquisition des stocks et des grandes unités de production… tout est envisageable.
Aussi certains distillateurs ont distribué de l’alcool à très fort degré, redistillé ou des têtes de distillation pour dépanner les personnels non soignants potentiellement exposés à travers le monde entier ou presque. Certaines îles ou pays ne peuvent plus se fournir en éthanol et les distilleries locales prennent le relais jusqu’en Nouvelle-Calédonie, en Jamaïque, à la Barbade ou en Haïti. Tous les éléments pour la production de gel ne sont pas toujours réunis, qui évitent entre autres l’irritation de la peau et l’absence de spores dans l’éthanol, mais ils font déjà face avec les moyens du bord. #AquaVitae2020
Audrey Vacher, avec l’aide précieuse d’Alexandre Vingtier